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L'essentiel sur les légumineuses

Dal, feijoada, cassoulet, pasta e fagioli, hummus, frijoles refritos, cocido…Qu’ont en commun ces plats aux noms évocateurs? Ils sont tous à base de légumineuses, une denrée qui a des racines profondes dans les traditions culinaires du monde entier. Économiques, nutritives et étonnamment polyvalentes, les légumineuses auraient avantage à se retrouver plus souvent dans notre assiette.

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Les légumineuses se conservent longtemps, mais il y a un problème : plus elles sont vieilles, plus elles deviennent dures à cuire. En effet, avec le temps, il se produit des modifications chimiques du tissu végétal qui augmentent la dureté de la graine et sa résistance à la cuisson. Mieux vaut faire provision dans un magasin où le roulement des stocks est bon. Et il est peut-être temps de jeter le vieux sac de haricots qui traîne dans le garde-manger depuis quelques années!

Faire tremper

Il est préférable de faire tremper les légumineuses avant la cuisson, sauf celles de petite taille comme les lentilles, les pois cassés, les haricots mung et aduki. Certains estiment que le trempage est facultatif. C’est vrai, mais sans trempage préalable, les légumineuses mettent beaucoup plus de temps à cuire! En effet, le principal obstacle à l’amollissement des légumineuses est leur tégument (enveloppe extérieure), qui agit comme une barrière à l’absorption de l’eau. Or l’eau est essentielle à l’attendrissement des graines. Le trempage permet de les réhydrater et de ramollir leur tégument, ce qui réduit par le fait même le temps de cuisson.

Un trempage normal requiert de 8 à 12 heures. Utiliser au moins trois parties d’eau pour une partie de légumineuses, car elles triplent de volume durant le trempage. Si l’on est pressé, on peut opter pour la technique rapide : apporter l’eau à ébullition, laisser mijoter 1 à 2 minutes, retirer la casserole du feu et laisser reposer 1 heure. Les haricots seront ensuite prêts pour la cuisson.

Des expériences ont montré qu’ajouter du sel à l’eau de trempage aide à attendrir les légumineuses (les téguments qui sont souvent coriaces). Par quel effet le sel agit-il? Commençons par comprendre que le tissu des végétaux est fait de cellules jointes par un ciment végétal composé de pectine et d’hémicellulose. Ce ciment contient des ions de calcium et de magnésium qui renforcent sa structure. Pour attendrir les légumineuses, il faut que ce ciment végétal puisse se dégrader. Or les ions de sodium du sel lui donneraient un petit coup de main : durant le trempage, ils viendraient remplacer des ions de calcium et de magnésium. Cette modification affaiblit le tégument et lui permet de s’attendrir plus facilement à la cuisson. Utiliser environ 10 ml (2 c. à thé) de sel par litre (4 tasses) d’eau.

Cuire

Préférer une cuisson dans de l’eau fraîche et non dans l’eau de trempage (cela réduit les flatulences – voir plus loin) et faire cuire à feu doux, plutôt qu’à grande ébullition (cela évite que les téguments se détachent et que les graines se brisent). Cuire les légumineuses jusqu’à ce qu’elles soient très tendres, ce qui peut prendre 30 à 45 minutes dans le cas des lentilles et des pois cassés et jusqu’à 3 heures pour les pois chiches et les graines de soya.

D’autres méthodes de cuisson sont aussi possibles : dans une cocotte au four, dans une mijoteuse ou dans un cuiseur sous pression. L’autocuiseur réduit considérablement le temps de cuisson, mais requiert quelques précautions. Il vaut mieux s’en remettre aux conseils donnés dans le manuel d’utilisation de votre appareil.

Lorsque les légumineuses sont cuites dans une eau dure, riche en calcium et en magnésium, elles s’amollissent difficilement. En effet, ces minéraux s’infiltrent dans les téguments et les graines, et s’attachent à la pectine et à l’hémicellulose, les renforçant, ce qui nuit à leur dégradation. Si votre eau est dure, trois solutions s’offrent à vous :

  • faire tremper les légumineuses dans de l’eau salée (10 ml par litre d’eau) – voir l’explication ci-dessus, ou
  • utiliser de l’eau embouteillée pour le trempage et la cuisson, ou
  • ajouter 1 ml (1/4 c. à thé) de bicarbonate de sodium à l’eau de trempage et à l’eau de cuisson; le bicarbonate, qui est basique, accélère la dissolution de l’hémicellulose, mais, attention, une quantité excessive donne un goût désagréable et détruit une partie des vitamines.

Donner du goût

Il est possible de donner du goût aux légumineuses durant la cuisson en leur ajoutant des fines herbes et des épices, de l’oignon, du céleri, des carottes, du lard salé, bref tout ce qui vous plaît… tout sauf des ingrédients acides. Les ingrédients tels que les tomates, le ketchup, la mélasse, le vinaigre ou le jus de citron empêchent les légumineuses de s’attendrir en retardant la dissolution de l’hémicellulose. Pour éviter ce problème, ajoutez-les vers la fin de la cuisson. Dans certaines recettes, comme les fèves au lard, les ingrédients acides sont ajoutés en début de cuisson. La cuisson s’en trouve prolongée (elle prend parfois plusieurs heures et même une nuit), mais cela permet aux haricots de conserver leur forme tout en développant le goût extraordinaire qu’on leur connaît.

Réduire les flatulences

Les flatulences sont causées par des oligosaccharides (des sortes de glucides) et des fibres qui résistent au processus normal de la digestion, notre système digestif n’ayant pas les enzymes nécessaires pour les dissoudre. Elles se retrouvent donc intactes dans la partie inférieure du tube digestif, où elles sont dévorées par notre flore bactérienne qui les transforme en partie en gaz malodorants. Certaines légumineuses seraient plus offensives que d’autres. C’est le cas notamment des petits haricots blancs (utilisés pour faire les fèves au lard), des graines de soya et des haricots de Lima. Mais consolez-vous : ces mêmes oligosaccharides auraient des effets bénéfiques pour la santé intestinale, en favorisant le développement de bactéries bénéfiques et en limitant celui des bactéries nuisibles.

Les « vents » vous embêtent? Voici comment les réduire :

  • Utiliser la méthode de trempage rapide, qui extrait davantage d’oligosaccharides que le trempage normal. Jeter l’eau de trempage, faire cuire les légumineuses dans une eau fraîche jusqu'à ce qu’elles soient très bien cuites et ne pas utiliser l’eau de cuisson. Ce sont les seuls moyens réellement éprouvés pour réduire les flatulences.
  • Dans le cas de légumineuses en conserve, les rincer avant de les consommer.
  • On peut aussi tenter sa chance avec la préparation d’enzymes « Beano », vendue en pharmacie. Il s’agit d’un produit analogue au Lact-Aid, utilisé contre l’intolérance au lactose, mais son efficacité varie d’un individu à l’autre.
  • Pour ce qui est des trucs tels qu’ajouter du gingembre frais, du bicarbonate, de l’algue Kombu ou de l’epazote (une herbe) à l’eau de cuisson, leur efficacité relève de l’anecdote et n’a pas été prouvée scientifiquement.

À découvrir: les haricots frais en cosse!

La fin de l’été est la saison idéale pour faire l’essai des légumineuses fraîches (aussi appelées demi-secs), comme les fagioli romano ou haricots romains vendus dans les marchés publics. Contrairement aux haricots secs, qui sont récoltés à la fin de l’automne après avoir séché sur la plante, les haricots frais sont cueillis alors qu’ils sont encore humides. Ils se conservent environ une semaine dans leur cosse, au réfrigérateur. Il suffit de les écosser et de les faire cuire dans de l’eau bouillante salée, environ 20 minutes, jusqu’à ce qu’ils soient tendres. Servez-les tels quels, chauds ou tièdes, avec un filet d’huile d’olive extra vierge, de la fleur de sel et des copeaux de parmesan. Simple mais délicieux.

Christina Blais

Pour Christina Blais, vulgariser la chimie des aliments est simple comme de préparer une bonne omelette. Détentrice d’un baccalauréat et d’une maîtrise en nutrition, elle a enseigné les cours de «Science des aliments» et de «Salubrité alimentaire» au Département de nutrition de l'Université de Montréal pendant plus de 30 ans. Depuis 2001, elle présente le fruit de ses expériences avec Ricardo dans le cadre de l’émission de télé de celui-ci, sur les ondes de Ici Radio-Canada Télé. Les curieux peuvent lire ses chroniques Chimie alimentaire sur le site web de Ricardocuisine. Suivez-la aussi sur @Encuisineavecchristinablais sur Facebook.

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