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Les huiles aromatisées: dangers et précautions

La mise en conserve des récoltes abondantes de l’automne est une activité réjouissante. Mais encore faut-il que les conserves… se conservent. Le botulisme, cela vous dit quelque chose ?

Qu’est-ce que le botulisme ?

Le botulisme est une intoxication alimentaire causée par la bactérie Clostridium botulinum. Cette bactérie se trouve partout dans la nature, sous forme de spores. Les spores sont une forme résistante de la bactérie, qui lui permet de survivre à des conditions extrêmes, comme le gel, la sécheresse et la chaleur. Les spores d’une bactérie sont un peu l’équivalent des graines d’une plante. Tout comme elles, les spores se réveillent et vont germer uniquement lorsqu’elles se retrouvent dans des conditions favorables.

Les dangers du botulisme

Quand les conditions favorables au développement des spores sont réunies (voir ci-dessous), elles se transforment en de véritables bactéries, qui se multiplient rapidement. Pendant qu’elles se multiplient, les bactéries Clostridium botulinum produisent une toxine extrêmement dangereuse, la toxine botulique, qui est la plus redoutable de toutes les toxines connues de l’homme. Une toute petite quantité suffit pour rendre très malade et même causer la mort. Son mode d’action : elle empêche la transmission normale du signal nerveux entre les nerfs et les muscles, blocage qui peut causer la paralysie. Pas surprenant alors que les premiers symptômes du botulisme soient des paupières tombantes, des difficultés à avaler et à parler, une vision double et des faiblesses musculaires. Et lorsque les muscles de la respiration sont atteints, on s’imagine bien la suite...

Avec une telle dangerosité, il faut tout faire pour éviter le botulisme. D’ailleurs, tellement de précautions sont prises au sein de l’industrie alimentaire que les cas sont effectivement assez rares. Il s’en produit à peine une dizaine par année au Canada. Mais les conséquences sont tellement graves, que même un cas, c’est un de trop, qui aurait pu être évité. Malheureusement, il y a encore des incidents qui sont causés par la consommation d’aliments préparés à la maison qui n’ont pas été traités correctement.

Les conditions favorables

C’est seulement lorsque les spores de Clostridium botulinum se retrouvent dans un environnement qu’elles aiment qu’elles se transforment en bactéries qui sécrètent une toxine dangereuse. Quelles sont ces conditions favorables ? Il y en a quatre :

  1.  Absence d'oxygène : Les spores ne se développent que dans un environnement où il n’y a pas d’oxygène, comme dans une boîte de conserve ou un emballage sous vide, ou encore en dessous d’une couche épaisse d’huile ou de gras qui coupe le contact avec l’air.
  2.  Température ambiante : Les spores aiment être au chaud, dans un endroit où la température n’est ni trop chaude ni trop froide, soit entre 18 et 40 °C. Chose certaine, l’activité des spores et des bactéries est grandement ralentie par la réfrigération.
  3.  Humidité : Tout comme les graines d’une plante, il faut de l’eau pour permettre aux spores de germer et aux bactéries de se multiplier. Les aliments frais contiennent juste assez d’eau alors que les aliments secs (farines, fines herbes séchées, noix et graines) ne permettent pas la croissance de la bactérie.
  4.  Pas trop d'acidité : Les spores préfèrent les aliments peu acides, comme les viandes, les volailles et les poissons, ainsi que les légumes et les fines herbes fraîches, mais ne tolèrent pas les aliments acides, comme les fruits et le vinaigre.

Les huiles aromatisées

Des cas de botulisme ont déjà été causés par la consommation de préparations d’ail haché conservé dans l’huile ainsi que d’huiles aromatisées contenant des herbes fraîches, lorsque celles-ci étaient entreposées à la température ambiante. Pourquoi ? Ici, toutes les conditions favorables sont réunies : l’épaisse couche d’huile coupe le contact avec l’oxygène de l’air, l’ail et les fines herbes fraîches sont peu acides et contiennent de l’eau et les préparations n’étaient pas réfrigérées. Bingo : botulisme !

Comment se protéger ?

Sachez qu’il n’y a aucun danger à ajouter des légumes frais (ail, échalotes, gingembre, etc.) ou des fines herbes fraîches à de l’huile si la préparation est utilisée immédiatement. Cependant, les restes doivent absolument être conservés au réfrigérateur et utilisés dans la semaine qui suit. Autrement dit, il n’est pas conseillé de consommer le produit au-delà de sept jours. Rappelez-vous que la réfrigération ralentit le développement des spores du botulisme, mais ne le stoppe pas complètement.

Et les conserves maison ?

Les conserves de légumes peu acides (asperges, haricots, maïs) ou de viande préparées à la maison et qui n’ont pas été stérilisées correctement peuvent causer le botulisme. Ces types de conserves présentent toutes les conditions favorables à la germination des spores : les pots de conserves sont scellés hermétiquement (donc ne contiennent pas d’oxygène) et sont entreposés à la température ambiante. De plus, les viandes et légumes contiennent de l’humidité et ne sont pas acides.

Comment éviter le pire?

La mise en conserve domestique d’aliments peu acides (ou dans lesquels on n’ajoute pas une grande quantité d’un ingrédient acide) doit absolument inclure une étape qui vise à détruire les spores de Clostridium botulinum. Le seul et unique moyen de le faire efficacement est par un traitement de chaleur dans un cuiseur sous pression (un autoclave), spécialement conçu pour la mise en conserve.

Contrairement à un simple traitement à l’eau bouillante, la température qu’atteint le cuiseur sous pression permet la destruction des spores, à la condition de laisser les bocaux pendant la durée recommandée. Ce temps de traitement varie selon la grosseur du bocal et la densité de l’aliment. On trouve facilement ces indications dans des livres et les sites Web consacrés à la mise en conserve. Pour en savoir davantage, visitez le site de Santé Canada à www.hc-sc.gc.ca et tapez botulisme dans le moteur de recherche.

Mais rassurez-vous : la stérilisation sous pression n’est pas nécessaire pour les conserves maison à base de fruits, telles que les confitures, tartinades et compotes, ni pour les conserves où l’on ajoute beaucoup de vinaigre ou de jus de citron, comme les salsas, relishs, chutneys et ketchups, car l’acidité de ces ingrédients protège contre la germination des spores. Pour ces types de conserves, il suffit de traiter les bocaux dans l’eau bouillante après les avoir remplis.

Un traitement à la chaleur permet de déshydrater les ingrédients ajoutés, tout en permettant le transfert des arômes à l’huile, sans les risques du botulisme. Voici une technique simple, mise au point pour les huiles aromatisées conservées au réfrigérateur, qui permet de les garder jusqu’à quatre semaines.

Huile aromatisée en 3 étapes

  1.  Choisir un, deux ou trois ingrédients frais aromatiques parmi ceux proposés ci-dessous (voir Choisissez vos ingrédients). Chaque ingrédient frais choisi compte comme une unité. Plus il y a d’unités, plus le temps de chauffage au four doit être long pour assurer la conservation de l’huile. Par contre, les ingrédients secs (feuilles de laurier, graines de fenouil, cumin, poivre noir, etc.), qui renferment peu d’humidité, peuvent être ajoutés au goût, sans que cela change le temps de chauffage.
  2.  Verser 250 ml (1 tasse) d’huile végétale (canola, tournesol ou olive) dans une tasse en pyrex d’une capacité d’au moins 500 ml (2 tasses). Ajouter les ingrédients aromatiques et secs dans l’huile. Placer la tasse dans un plat à tarte et déposer le tout au centre du four. Chauffer le four à 150 °C (300 °F) et laisser cuire selon le temps indiqué dans l’aide-mémoire. Retirer du four et laisser tiédir environ 30 minutes.
  3.  Filtrer l’huile dans un bocal propre, à travers un filtre à café ou un papier absorbant. Conserver votre huile aromatisée au réfrigérateur, jusqu’à quatre semaines.

Choisissez vos ingrédients

Chaque quantité indiquée équivaut à une unité (reportez-vous à l’aide mémoire pour les temps de cuisson)

 
  • Noix hachées grossièrement : 60 ml (1/4 tasse)

     

  • Piments ou poivrons en cubes de 1 cm : 30 ml (2 c. à soupe)

     

  • Échalotes en cubes de 1 cm : 30 ml (2 c. à soupe)

     

  • Zeste de citron, d’orange ou de lime en lanières : 30 ml (2 c. à soupe)

     

  • Gingembre frais en tranches : 30 ml (2 c. à soupe)

     

  • Piments jalapeño : 30 ml (2 c. à soupe)

     

  • Échalotes françaises : 30 ml (2 c. à soupe)

     

  • Ail : 5 gousses

     

  • Romarin frais : 10 brindilles de 5 cm

     

  • Feuilles de basilic : 15 feuilles

De belles combinaisons

Quelques propositions d’assemblages de saveurs qui feront merveille sur un poisson grillé ou des pâtes, dans une salade ou sur une pizza.

 

ail + zeste de lime + gingembre

ail + zeste de citron + romarin

ail + piment jalapeño + coriandre

ail + estragon + zeste de pamplemousse

échalote + noix de Grenoble + basilic

Huile à l’ail express

On souhaite aromatiser une huile à l’ail sans tout ce processus ? On nettoie bien une gousse d’ail, on la pique dans une tige de bois à brochette et on la met dans notre bouteille d’huile, au réfrigérateur. Trois jours plus tard, on l’enlève facilement en tirant simplement sur la broche.

Aide-mémoire pour les huiles aromatisées

250 ml (1 tasse) d’huile végétale + le nombre d’unités désiré

  • Une unité : 1 h 20 au four
  • Deux unités : 1 h 40 au four
  • Trois unités : 2 h au four

Christina Blais

Pour Christina Blais, vulgariser la chimie des aliments est simple comme de préparer une bonne omelette. Détentrice d’un baccalauréat et d’une maîtrise en nutrition, elle a enseigné les cours de «Science des aliments» et de «Salubrité alimentaire» au Département de nutrition de l'Université de Montréal pendant plus de 30 ans. Depuis 2001, elle présente le fruit de ses expériences avec Ricardo dans le cadre de l’émission de télé de celui-ci, sur les ondes de Ici Radio-Canada Télé. Les curieux peuvent lire ses chroniques Chimie alimentaire sur le site web de Ricardocuisine. Suivez-la aussi sur @Encuisineavecchristinablais sur Facebook.

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