Recettes  

Chaud les marrons!

Marrons bouillis, marrons grillés, marrons glacés ou en purée, peu importe la façon, ces délicieux petits fruits sont incontournables quand arrive la période des fêtes.

Pas toujours facile de marier la langue scientifique au vocabulaire culinaire. Les incongruités sont innombrables. Concombre, tomate, poivron, aubergine sont tous des légumes dans notre assiette, alors qu'en réalité ce sont des fruits qui proviennent d'une fleur. Le poivre rose n'est pas du poivre, et les marrons frais que l'on déguste à partir de l'automne…. ne sont pas des marrons, enfin pas tout à fait.

Confusion sur le marron

Qui aurait l'idée de croquer les gros fruits de nos marronniers d'Inde qui enjolivent nos parterres, même si les écureuils semblent les apprécier au plus haut point ? C'est que le marron est considéré comme toxique, du moins pour les humains.

Attention aux enfants ! Rarement fatal, il peut néanmoins causer des vomissements, la perte de la coordination des mouvements et parfois la paralysie. Rien à voir donc avec la purée de marrons, la glace aux marrons ou encore les « marrons chauds » vendus dans les rues des grandes villes.

La confusion ne date pas d'hier, puisque c'est dans les années 1500, semble-t-il, que le mot marron commença à être attribué au fruit du… châtaignier, et cela, avant même que le marronnier ne soit connu en France. Le terme nous vient du mot caillou, en ancien français, une allusion à la forme des fruits du marronnier et du châtaignier, deux arbres qui n'ont cependant aucun lien de parenté.

Le châtaignier

De la grande famille du hêtre, le châtaignier est cultivé depuis des millénaires pour son fruit, la châtaigne. Il peut vivre plus de 500 ans (parfois le double) et atteindre 20 mètres et même 30 mètres de hauteur. Ses fruits sont parfois regroupés par deux ou par trois et contiennent une ou deux graines recouvertes d'abord par une couche coriace brune, puis par une pellicule rougeâtre qui entoure l'amande, même dans ses moindres replis. Cette enveloppe astringente doit être éliminée avant la consommation.

Le terme marron est attribué aux fruits des châtaigniers cultivés, qui produisent habituellement une seule amande par fruit. Les marrons sont ramassés vers la fin de l'automne, après leur chute sur le sol, et sont servis traditionnellement dans le temps des fêtes, avec du gibier. Les plus gros sont souvent confits ou conservés dans l'alcool.

Introduit d'abord en Grèce en provenance du Moyen-Orient, le châtaignier a formé progressivement des forêts entières sur le territoire européen, au point de jouer un rôle central dans l'économie humaine, notamment en menuiserie et dans l'alimentation. On en faisait même une farine ce qui lui vaut parfois l'appellation d'arbre à pain, une tradition d'ailleurs maintenue dans certaines régions.

On compte seulement une douzaine d'espèces de châtaigniers dans le monde, mais les cultivars utilisés en culture se chiffrent à une centaine et ils donnent des fruits de taille et de goût divers. Plusieurs d'entre eux sont apparentés au châtaignier chinois.

La Chine est d'ailleurs le premier producteur du monde, avec 40 % de la production mondiale qui atteint autour de 500 000 tonnes métriques. Par ordre d'importance, les autres producteurs principaux sont la Corée, suivie de l'Italie, du Portugal, de la France et de l'Espagne. La production du Japon est aussi très importante, mais elle ne suffit pas aux besoins de la population, puisque le pays est le principal importateur.

Le destin tragique du châtaignier d'Amérique

Il existe cinq espèces de châtaigniers en Amérique du Nord dont le célèbre châtaignier d'Amérique, un arbre de 30 mètres de haut qui formait d'immenses forêts, du sud de l'Ontario à la Floride en passant par plusieurs États du Midwest. Ses fruits étaient l'objet d'un commerce en fin d'automne, mais l'arbre faisait surtout vivre toute une industrie forestière.

En 1904, la brûlure du châtaignier, une maladie d'origine fongique, faisait son entrée en terre d'Amérique, avec un lot de châtaigniers importés d'outre-mer. Le champignon maléfique, qui sévissait en Europe et en Asie, se montra dévastateur sur le continent nord-américain. Ce fut la catastrophe. En moins de 30 ans, l'espèce américaine était décimée. On parle de 4 milliards d'arbres. Ne survivent aujourd'hui que de petits chicots qui meurent tous en très bas âge.

En mai dernier, on a toutefois découvert, en Géorgie, un spécimen d'environ 12 mètres de haut et âgé d'une quarantaine d'années; un espoir pour ceux qui rêvent encore de manger un jour des marrons d'Amérique.

Préparation des marrons

Il existe trois méthodes pour éplucher les marrons, mais peu importe celle que vous choisirez, sachez que vous devrez vous armer de patience !

La première méthode consiste à enlever l'écorce et la peau à l'aide d'un petit couteau bien aiguisé. C'est la meilleure méthode pour obtenir des marrons crus.

La deuxième méthode consiste à percer un trou dans chaque marron avec la pointe d'un couteau. Étendre les noix sur une plaque à cuisson et griller au four à 180 °C (350 °F), de 45 minutes à 1 heure, ou jusqu'à ce que l'écorce éclate. Laisser refroidir et éplucher.

La troisième méthode consiste à faire une incision en forme de croix sur l'écorce pour ensuite les faire bouillir dans l'eau de 30 à 45 minutes. Égoutter et éplucher. Si elles s'épluchent difficilement, replongez-les dans l'eau bouillante.

Il est plus facile d'éplucher les marrons lorsqu'ils sont chauds, mais la tâche est tout aussi longue…Le marronnier d'Inde

Le marronier d'Inde

Introduit en France en 1576 sous forme de graines en provenance de Turquie, le marronnier d'Inde doit son nom à une erreur. On croyait qu'il venait de l'Inde alors qu'il est tout simplement originaire des Balkans, notamment du nord de la Grèce.

C'est un arbre ornemental très popu-laire au Québec, en raison de ses fleurs en forme d'épis blancs (il en existe une variété à fleurs rouges, magnifique), qui atteint une trentaine de mètres de hauteur et peut vivre plus de 100 ans.

Le fruit est une grosse capsule épineuse appelée bogue qui contient deux graines de grande taille, de couleur brune. En Europe, à une certaine époque, on en fabriquait un féculent qui servait à nourrir certains animaux de ferme comme le porc, le mouton et la chèvre.

En cuisine

À l'achat, recherchez des marrons lourds, durs et d'un brun luisant. Écartez les fruits amollis et ridés. À défaut d'en trouver à l'état frais, on trouve sur le marché, toute l'année, des marrons entiers pelés, cuits et emballés sous vide dans certaines épiceries fines. Les conserves de marrons entiers, de purée nature ou sucrée (crème de marrons) sont disponibles dans la majorité des supermarchés.

À cuisiner grillés, étuvés, bouillis, en confiture, en purée, en dessert ou pour accompagner les plats de volaille et de gibier. Ils sont réservés aux emplois « nobles » et sont utilisés pour la fabrication de la crème de marrons, la purée en conserve, la farine et les fameux marrons glacés que l'on mange comme des friandises.

À conserver dans un endroit frais et sec. Les marrons frais avec leur peau se garderont une semaine à la température ambiante ou un mois au réfrigérateur, dans un sac de plastique perforé. Une fois pelés et cuits, les marrons se conservent quelques jours au réfrigérateur. On peut aussi les congeler crus ou cuits. Ils se conserveront environ six mois.

Pierre Gingras

Pierre Gingras parle d’horticulture, de chasse et de pêche comme si c’était une seconde nature. Cet ex-professeur d’écologie traite de fleurs, de plantes et de potager depuis plus de 30 ans dans différents médias, notamment au quotidien La Presse. Il discute de ses sujets de prédilections avec Ricardo durant l’émission quotidienne de celui-ci sur les ondes de Ici Radio-Canada Télé. Depuis 2001, il signe la page Du potager à la table dans le magazine Ricardo. Il est également l’auteur de l’ouvrage Les bulbes, publié aux Éditions de l’Homme.

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