Recettes  

Laurence répond à nos questions: les conseils de notre experte pour réussir ses boulangeries maison

De la fermentation à la cuisson, la confection de pains, de brioches et autres pâtes levées regorge de détails subtils mais essentiels. Notre cheffe Laurence Viens explique certaines des erreurs fréquentes et donne ses conseils pour obtenir de meilleurs résultats à la maison.

Quelles sont les erreurs les plus souvent commises par les novices en boulangerie?

Beaucoup de pâtissiers et de boulangers amateurs négligent cette première étape essentielle: lire la recette! En la lisant attentivement, on la comprend mieux et on peut la planifier. «Par exemple, explique Laurence, si on décide de préparer des brioches à la cannelle en milieu d’après-midi, il faudra cuire en soirée. Contrairement à des biscuits, qu’on peut facilement faire sur un coup de tête, il faut prévoir le temps nécessaire, surtout lorsque deux levées sont requises.»

Une autre erreur fréquente consiste à confondre les types de levure. «La levure instantanée est celle qu’on utilise le plus souvent, poursuit-elle. Mais ce n’est pas la même chose que la levure à pizza ou la levure traditionnelle: il faut s’assurer d’avoir le bon type.» On n’oublie pas non plus de tester sa levure pour vérifier qu’elle est encore active.

Enfin, il ne sert à rien d’utiliser sa farine préférée dans une recette qui n’en prévoit pas. C’est une erreur de supposer qu’on peut la remplacer à parts égales. «Si la recette demande de la farine blanche tout usage, mieux vaut ne pas la substituer à de la farine de blé entier. Cette dernière est peut-être plus savoureuse et nutritive, mais elle réagit différemment à l’eau et nécessite davantage d’hydratation. Il en va de même pour d’autres farines de céréales (épeautre, avoine, seigle, etc.), d’où l’importance de choisir une recette adaptée à la farine utilisée, surtout s’il s’agit de notre première expérience en boulangerie.»

Sans gluten?

On évite d’utiliser de la farine sans gluten dans une recette qui demande de la farine de blé. Les agents liants qu’elle contient réagissent différemment, et le résultat ne sera jamais à la hauteur. De plus, l’absence de gluten signifie que la pâte n’aura aucune structure. On se tourne plutôt vers une recette de pain sans gluten, conçue spécialement pour ce type de farine.

Quelle est l’importance de la température en boulangerie?

La température de l’eau, comme de l’environnement, peut avoir un impact considérable sur la fermentation. Le temps de la fermentation dépend généralement de la température et tout changement se répercute directement sur le processus. «La plupart des recettes exigent de l’eau tiède, mais si la recette est conçue pour une longue fermentation (comme c’est le cas pour cette focaccia sans pétrissage), la température de l’eau change.» On peut toujours l’adapter légèrement en fonction de l’environnement et laisser fermenter plus longtemps quand il fait froid en hiver, et raccourcir le temps en été.

Il reste que l’étape la plus importante est de suivre la recette, particulièrement s’il s’agit d’une première fois. Plutôt que de se fier uniquement au temps, on peut se laisser guider par d’autres indicateurs et observer attentivement sa pâte. «La levure est un micro-organisme susceptible de réagir différemment selon les moments, poursuit-elle. La pâte a sa propre personnalité qui évolue, alors on reste attentif aux signes visuels: a-t-elle doublé de volume? Est-elle collante ou brillante? Cela peut vous en dire beaucoup.»

Pourquoi mesurer précisément les ingrédients est-il si important?

La boulangerie repose sur un réseau de gluten. «Le gluten se développe quand la protéine de blé entre en contact avec l’eau, apportant de la structure à la pâte, explique Laurence. Cette structure est essentielle au pain, car elle emprisonne le gaz libéré par la levure. Ainsi, si la structure est défaillante, le pain ne lèvera pas.»

Pour créer ce réseau de gluten, il faut les bonnes proportions de farine, d’eau et de sel. C’est pourquoi une balance est une alliée incontournable en boulangerie, permettant de mesurer les ingrédients avec précision.

Il est bon de rappeler qu’on sous-estime souvent le sel: non seulement il rehausse la saveur, mais il aide aussi à lier les ingrédients, à retenir l’humidité en plus d’influencer la coloration lors de la cuisson, d’apporter du goût… et d’assurer la bonne formation du réseau de gluten. Il faut donc la bonne quantité de sel, ce qui exige aussi la bonne quantité de farine. «Chaque élément joue un rôle précis et essentiel dans le pain. Pour obtenir les meilleurs résultats, il faut respecter les bonnes proportions et éviter les substituts.»

Quel est ton meilleur conseil pour obtenir une cuisson et une coloration uniformes?

Pour les pâtes sucrées enrichies comme la brioche, on peut utiliser une dorure à l’œuf, au lait ou à la crème. «Il faut laisser le temps au four de faire son effet. Certains pensent qu’une légère coloration dorée sur le dessus suffit, mais l’intérieur restera alors cru», prévient Laurence. «Il ne faut pas avoir peur de la couleur. Une croûte bien dorée développe de la saveur et crée un goût caramélisé délicieux.»

Quel est le rôle du repos et du refroidissement?

Laisser la pâte reposer est essentiel. Après le pétrissage et le façonnage, le réseau de gluten est sollicité et a besoin de se détendre pour que la pâte soit plus facile à façonner par la suite. «Si on laisse la pâte reposer entre deux manipulations, même quelques minutes seulement, elle sera beaucoup plus facile à travailler.»

De plus, on doit résister à l’envie de trancher un pain tout juste sorti du four. «Si la vapeur s’en échappe encore, c’est que la mie n’est pas encore stabilisée, explique Laurence. Une fois que la vapeur s’est évaporée, la mie sera bien prise et on pourra trancher le pain.» Si on ne laisse pas le pain refroidir, il va s’écraser dès qu’on y enfoncera un couteau. 

Comment se remettre d’un désastre en pâtisserie?

Il est parfois impossible de rattraper une recette ratée si on ne la suit pas correctement: «Si une recette indique de “pétrir 5 minutes”, on s’assure de respecter cette étape. Autrement, la structure ne se développera pas comme il se doit, prévient Laurence. Et si on a omis de mesurer les ingrédients avec précision, il n’y a malheureusement pas de retour en arrière possible.»

Cependant, «si la pâte est trop collante, on peut la laisser reposer 30 minutes et voir si la texture change. Ajouter de la farine compromettrait le bon équilibre des ingrédients». La farine continue à s’hydrater d’elle-même, les amidons et les protéines absorbent l’humidité pendant ce temps. Cela peut suffire à rendre la pâte plus souple, plus lisse et moins collante.

Est-ce qu’on peut rehausser la saveur d’une pâte?

Oui, mais dans la limite du raisonnable: «Tant qu’on ne touche pas aux quantités de farine, d’eau, de sel, de levure et de sucre, on peut ajouter, par exemple, des olives ou des aromates comme des herbes ou du fromage. On peut même sublimer une focaccia nature en ajoutant du jambon ou du zeste de citron.»

Avant de le faire, il est toutefois important d’obtenir une belle pâte stable. Ce n’est qu’ensuite qu’on peut la personnaliser à sa guise. «Si on ajoute des olives au mélange farine/eau, par exemple, elles pourraient affaiblir le réseau de gluten et ainsi compromettre la structure de la pâte, précise Laurence. Une fois qu’on a une belle pâte, on peut y incorporer d’autres ingrédients avant la première fermentation.»

Autres rehausseurs de farine ou ingrédients de substitution: 
  • Le sucre: Il n’est pas interchangeable. On évite de le remplacer par du miel ou du sirop d’érable, «parce que ce sont des liquides et ils affecteraient la structure et le taux d’hydratation de la pâte».
  • Ingrédients ajoutés: Si une recette de brioche prévoit du chocolat, mais qu’on préfère des pacanes, c’est un substitut acceptable. Les raisins d’un pain aux raisins peuvent être retirés. «De petits changements de ce type sont possibles.»
  • Jus de pomme: Il peut remplacer l’eau si la recette le permet. Selon qu’il est plus acide ou sucré, cela pourrait influencer les proportions d’ingrédients: «Il faut rester prudent», recommande Laurence.
  • Le lait: Il peut être remplacé par une boisson à l’avoine, dont le goût s’harmonise avec le blé de la farine. La saveur des boissons d’amandes ou de soya peut être trop prononcée.
  • Le beurre: Certains beurres végétaux sont une bonne option, tant qu’ils réagissent de la même façon que le beurre (c’est-à-dire qu’ils se raffermissent au froid). L’huile de noix de coco nature et les huiles végétales solides conviennent également.

Envie d’inspiration? On consulte notre sélection de recettes pour faire ses propres pains et viennoiseries maison.

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